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samedi 25 juillet 2009

Pas de Maroc démocratique sans constitution démocratique

Attadamoun, 25/07/2009

Les acteurs politiques et sociaux et les gens intéressés se préoccupent beaucoup en ce moment du bilan de la dénommée ère nouvelle, celle de Mohamed VI en comparaison avec l’ère de Hassan II qualifié d’ère ancienne.
Cet intérêt s’explique par la commémoration du 10ème anniversaire de l’intronisation de Mohamed VI.
En tant qu’AMDH nous faisons partie des acteurs sollicités pour donner leurs points de vue sur les changements que pourrait avoir connu le Maroc dans notre champs d’activité, celui de la dignité et des droits humains.



Nous venons juste de commémorer le trentième anniversaire de la création de l’AMDH. C’était pour nous l’occasion de faire le bilan sur l’évolution des droits humains durant les trente dernières années depuis le 24 juin 1979. Nous avons considéré que le Maroc qui vivait au cœur des années de plomb en 1979 (des centaines de prisonniers politiques, des centaines de disparus, des centaines d’exilés à l’Etranger, des centaines de syndicalistes licenciés ou même emprisonnés au moment où le pouvoir ne cessait de brandir le slogan du processus démocratique) a connu des avancées partielles dans le domaine des droits politiques et civils grâce au combat sans relâche du mouvement démocratique marocain appuyé par l’opinion démocratique internationale et aux changements au niveau mondial. Nous avons également considéré que ces acquis demeuraient fragiles, donc objets de régression faute de leur consécration par une constitution démocratique et de progrès simultanés au niveau du respect des droits économiques, sociaux et culturels.
Quant aux dix dernières années qui ont commencé en juillet 1999, 16 mois après la mise en place du gouvernement d’alternance consensuelle, elles ont été caractérisées par une inflation du discours officiel sur les droits humains et par un certain nombre d’initiatives et de signes positifs que d’aucuns, biens nombreux, ont considérés comme décisifs pour l’enracinement de la démocratie au Maroc. Tout cela était encadré par le slogan de la « transition démocratique ». Durant ces années il a été procédé à la mise en place de l’Instance Equité et Réconciliation, l’adoption de la loi sur la famille et de la loi contre la torture, la création du Diwan Al Madalim.
Mais ces années ont connu également et sans être exhaustif :
- Les opérations électorales à caractère national des trois dernières années : élections du tiers de la chambre des conseillers en septembre 2006, élections de la chambre des représentants en septembre 2007 et les toutes dernières élections de juin 2009 relatives aux collectivités locales ; elles ont été l’occasion d’un grand détournement de la volonté populaire et de la mise en place d’institutions sans légitimité populaire surtout que le taux de participation réelle pour les deux derniers n’a guère dépassé le tiers des citoyen(ne)s en âge de voter.
- Non application des recommandations de réformes essentielles de l’Instance Equité et Réconciliation concernant la constitution, la justice, la gouvernance sécuritaire, l’abolition de la peine de mort, l’adhésion à la Cour Pénale Internationale et la mise en place d’une stratégie de lutte contre l’impunité, la primauté des conventions internationales sur la législation locale et la poursuite de la recherche de la vérité sur les dossiers en suspens.
- Continuité des violations graves liées à la répression politique (enlèvements, torture, arrestations arbitraires surtout en liaison avec la stratégie sécuritaire de lutte contre le terrorisme dont la loi antiterroriste constitue une pièce maitresse) et à la dilapidation des biens publics.
- Recrudescence des violations contre la liberté d’expression et la liberté de la presse (la dernière en date étant le procès intenté au président de la section AMDH à Khénifra et au directeur de l’hebdomadaire Al Michaal) et exclusion ou marginalisation de l’AMDH et des opposants au niveau des médias publics
- Dégradation de la situation de la justice en liaison avec ses tares connues et reconnues en matière d’indépendance, d’intégrité et de compétence.
- Détérioration de la situation dans les prisons.
- Recrudescence de l’inégalité homme-femme et persistance de la violence et des agissements contre la dignité des femmes.
- Enormes violations du droit du travail qu’il s’agisse du droit au travail – notamment pour les diplômés enchômagés – ou des droits des travailleurs –y compris ceux consacrés par le code du travail – qui sont violés systématiquement au vu et au su des autorités concernées.
- Grandes violations des autres droits économiques et sociaux relatifs à l’enseignement, la santé, la sécurité sociale, le logement, la vie digne.
- Violations en rapport avec la faible protection constitutionnelle et juridique des droits culturels et linguistiques amazigh.
- Dégradation dangereuse d’autres droits relatifs aux enfants, à l’environnement, aux personnes handicapées et aux migrants.
Tout cela montre incontestablement que notre pays n’a toujours pas accédé à l’ère de l’Etat de Droit et de la Société de citoyenneté à laquelle aspirent avec force nos citoyennes et citoyens.
Il est devenu clair aujourd’hui que la passage à l’Etat de Droit et à la Société Citoyenne, et tout simplement à la démocratie dans le cadre de la constitution non démocratique actuelle est une lubie dont il est temps de se débarrasser : il n’y aura pas de Maroc Démocratique sans Constitutions Démocratiques.
C’est bien pour cela que l’AMDH n’a jamais cessé d’appeler à la mise en place d’une constitution démocratique quant à la méthodologie de son élaboration, son contenu et la procédure de son adoption.
Quant aux caractéristiques essentielles de cette constitution, elles ont été fixées notamment par la déclaration finale du dernier congrès de l’AMDH intégrées parmi les « revendications essentielles de l’AMDH » qui ont affirmé :
«La nécessité de l’adoption d’une constitution démocratique qui de par son contenu serait en harmonie avec les principes, les valeurs et les normes des droits humains universels et qui dans la forme garantit la participation des représentants du peuple à son élaboration de manière démocratique avant son adoption par voie de référendum populaire libre et intègre.
La constitution démocratique espérée doit consacrer :
- Les valeurs et normes des droits humains universels dont l’égalité, et en premier lieu l’égalité homme femme dans tous les domaines.
- Le principe de la primauté des conventions et pactes internationaux ratifiés par le Maroc sur la législation nationale.
- La souveraineté populaire qui fait du peuple la base et la source de tous les pouvoirs.
- Le gouvernement en tant que détenteur de toutes les prérogatives exécutives, le parlement en tant que détenteur de l’ensemble des prérogatives législatives et la justice comme pouvoir et non comme simple appareil.
- La séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire mais également de la Religion et de l’Etat.
La constitution Démocratique devra également établir les fondements d’une régionalisation démocratique, de la protection et de la promotion de la culture amazigh et reconnaitre la langue amazigh comme langue officielle aux côtés de la langue arabe.
L’AMDH, tout en posant avec force la revendication d’une constitution démocratique comme voie d’accès à l’édification de l’Etat de Droit et une société de citoyenneté avec l’intégralité des droits, exprime sa grande inquiétude à l’égard de toute nouvelle tentative visant à faire avorter cette revendication démocratique fondamentale en ayant recours à des amendements partiels et conjoncturels qui ne feront que sauvegarder l’essence despotique de l’actuelle constitution.
source : Editorial Attadamoun N°139-1408 Juillet-Aout 2009

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