(photo
: manifestation contre la réouverture de la prison de Tongres en 2009 /
betoging tegen nieuwe jeugdgevangenis in Tongeren in 2009)
Merci de diffuser.
*
Chère Madame, cher Monsieur, cher ami,
Les
constats alarmants sur la situation dans les prisons belges ne cessent
de s'accumuler, depuis des décennies. Les gouvernements successifs y
répondent par la même erreur : construire toujours plus de prisons. Nous
n'avons pas besoin de plus de prisons mais de plus de moyens pour la
justice, l’accompagnement des détenus, la réinsertion, la solidarité.
C'est le sens de l’appel que vous trouverez ci-joint, qui appelle à un moratoire sur la construction de toute nouvelle prison.
Il
est lancé au moment où le projet de mégaprison de Bruxelles, négocié
dans la plus complète opacité, pourrait être autorisé (le permis
d’urbanisme a été délivré, manque le permis d’environnement).
L'opposition de la société civile à ce projet nous semble constituer une
invitation à poursuivre la dynamique en l'approfondissant. La politique
carcérale actuelle est obsolète, elle doit évoluer. Il nous semble
visible qu'elle n'évoluera pas sans une implication significative de la
société civile.
Nous
appelons donc également à l’organisation d’états généraux citoyens de
la prison, qui devraient interroger fondamentalement la politique
carcérale actuelle.
Nous espérons pouvoir compter sur votre soutien que vous pouvez marquer en signant cet appel.
Merci d’envoyer votre NOM et votre FONCTION/PROFESSION par mail à Jean-Baptiste Godinot jbgodinot@rassemblement-r.be et/ou Luk Vervaet vervaetluk@gmail.com
Bien cordialement,
Luk Vervaet, Jean-Baptiste Godinot
*
Appel pour un
moratoire sur la construction de nouvelles prisons en Belgique
Le nombre de détenus en Belgique a doublé entre 1980
et les années 2000, passant de 5.000 à plus de 11.000. Cette inflation
carcérale ne s’explique pas par l’explosion du crime et de la délinquance, qui
sont restés stables[1].
Il s’agit d’un tournant punitif et répressif, également pris par la plupart des
pays européens au cours des années 1970 - 1980.
Les gouvernements successifs y ont
répondu par la construction de nouvelles prisons. En 30 ans, le nombre de
cellules a augmenté de 176%. Pendant la dernière décennie des nouvelles prisons
ont été construites, prétendument pour lutter contre la surpopulation
carcérale : à Ittre (2003), Hasselt (2005), Marche-en-Famenne (2013),
Leuze-en-Hainaut (2014) et Beveren (2014). Pourtant, le taux de surpopulation des
cellules en 2015 était encore de 10%. Un constat s’impose : plus on
construit de prisons, plus on les remplit.
Le gouvernement actuel annonce sa volonté d’en
construire davantage : à Vresse-sur-Semois,
à Lantin, à Verviers, à Leopoldsburg, à Wavre et à Paifve. Ainsi que les prisons de
Haren et de Termonde, pour l’instant bloquées par la mobilisation des citoyens.
La construction
d’une méga-prison à Haren est emblématique de la fuite en avant qui nous mène
droit dans le mur.
Elle devrait être la plus grande de Belgique, d’une
superficie de 51.000 m² de bâtiments, et 15.000 m² de surfaces extérieures, et
détruirait l’un des derniers grands espaces verts et arables de Bruxelles. Composée
de huit entités, elle permettrait l’enfermement de 1200 détenus.
Le coût total de
cette seule mégaprison, sur les 25 années que prévoit le contrat
du « partenariat-public-privé » négocié dans une complète
opacité, est estimé à plus de 3 milliards d’euros[2].
Cette somme colossale engloutie dans les murs d’une seule prison n’est, bien
entendu, plus disponible pour la Justice, qui est chroniquement sous-financée.
Elle ne l’est pas non plus pour la prévention de la délinquance, ni pour la
réinsertion des détenus.
Il est désormais connu que la désocialisation
qu’entraine la privation de liberté sur les détenus, la coupure d’avec leur
famille et la société, l’absence de programme de suivi et d’accompagnement ont
des effets dévastateurs sur leurs
capacités à se réinsérer dans la société, à trouver un emploi, un logement.
En Belgique,
environ 50% des détenus récidivent[3],
témoignage de l’échec cuisant de la prison comme peine de justice.
L’enfermement devait dissuader la délinquance, or, elle est parfois l’école du
crime.
La construction des nouvelles prisons, et de la
méga-prison de Haren en particulier, nous met devant un choix de société.
Rappelons que les prisons sont avant tout des prisons pour les pauvres. Pas
parce que les pauvres commettent plus de délits, mais parce qu’ils sont
davantage condamnés tout au long de la chaîne pénale. Le constat dressé dans le
dernier rapport 2016[4] de l’Observatoire international des prisons de Belgique est sans
appel : « la plupart des détenus possèdent une position
socioéconomique faible. La plupart n‘ont pas de diplôme. 30% seraient
analphabètes, 45% n’auraient que leur CEB[5]. Avec un parcours de vie empreint de ruptures avec les
institutions premières d'inscription au sein de la société, que ce soit au
niveau de la famille, de l'école ou du travail… »[6].
Pendant que des milliards sont
engloutis dans les prisons du Masterplan, la pauvreté et la misère se sont
aggravées à Bruxelles - huit des communes
belges avec le plus bas revenu moyen du pays se trouvent toujours à Bruxelles - et aucune politique actuelle ne permet
d'inverser cette tendance.
Nous n’avons pas besoin de plus de prisons, mais d’un
projet de société qui donne une place digne à chacun, qui mette un terme à la
misère et qui renforce les liens de solidarité. Plutôt qu’un énième
« masterplan prisons, nous voulons un « masterplan justice et
solidarité » capable d’offrir à tous un futur avec avenir.
Pour ces raisons, nous appelons à un moratoire immédiat sur la construction
de toute nouvelle prison en Belgique. Nous appelons également à l’organisation d’états généraux citoyens de la prison pour
tourner la page du désastre carcéral en cours.
[1] Voir les données de l’Institut national de criminalité
et criminaliste (INCC).
[2]
Soit 120 millions d’euros par ans en moyenne, ou
7% du budget annuel de la Justice en 2016, qui rapporté au PIB est l’un des
plus bas d’Europe.
[5]CAAP, Offre de services faite aux personnes détenues
dans les établissements pénitentiaires de Wallonie et de Bruxelles, 2013-2014.
[6]P. MARY, F. BATHOLEYNS, J. BEGHIN, « La prison en
Belgique : de l’institution totale aux droits des détenus ? », Déviance et
Société, 2006, vol. 30, n° 3, pp. 389 à 404.
[7] Zie de cijfers van het Nationaal Instituut voor Criminalistiek en
Criminologie (NICC) https://nicc.fgov.be/
[8] Een gemiddelde van 120 miljoen euro
per jaar, of 7% van het jaarbudget voor Justitie in 2016
[12] P.
MARY, F. BATHOLEYNS, J. BEGHIN, « La prison en Belgique : de l’institution
totale aux droits des détenus ? », Déviance et Société, 2006, vol. 30, n° 3,
pp. 389 à 404
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