Par Olivier Quarante,9/7/2012
Evoquer le conflit du Sahara occidental en France s’avère difficile, voire impossible, même quand on se nomme Javier Bardem.
Javier Bardem vient de participer et co-produire un documentaire sur le Sahara occidental : «Hijos de las nubes. La ultima colonia» (« Les enfants des nuages. La dernière colonie »)
A ce jour, le documentaire n’est pas distribué en France.
Le 29 mai dernier, l’acteur espagnol est venu présenter le film au Parlement européen du documentaire réalisé par Álvaro Longoria et qui retrace les grandes lignes de ces 37 ans de conflit.
Interrogé par Aline Pailler, productrice de l’émission «Jusqu’à la lune et retour» sur France Culture et co-présidente du Comité pour le respect des libertés et des droits humains au Sahara Occidental (CORELSO), sur l’absence de distribution de son film en France, Javier Bardem s’est montré «scandalisé», selon Aline Pailler.
Selon Aline Pailler, interrogée par Nouvellesdusahara.fr, «Javier Bardem a dit qu’il ne comprenait pas comment la patrie des Droits de l’Homme pouvait empêcher la diffusion d’un tel documentaire par la bouche des directions des chaînes publiques que l’équipe du film est allée rencontrer pour leur présenter le film. Il était très remonté par le fait que les chaînes de télévision aient refusé une telle diffusion».
Dès la sortie du film, sa diffusion en France était bien un des enjeux majeurs du projet qui a demandé quatre ans de travail.
Interrogé lors d’une conférence de presse, le réalisateur Álvaro Longoria a affirmé que sa distribution en France pourrait « faire la différence« . « Nous lui souhaitons une plus large diffusion, y compris dans des pays non acquis à la cause, comme la France« , a-t-il annoncé.
Une implication personnelle de Bardem
Le célèbre acteur espagnol s’est impliqué dans ce conflit en 2008 à l’occasion de son séjour dans les campements de réfugiés Sahraouis du sud-ouest de l’Algérie pour participer au festival de cinéma du campement de Dakhla.
Suite à cette implication, le comédien espagnol a décidé de s’investir personnellement dans la réalisation de «Hijos de las nubes. La ultima colonia». On le voit mis en scène en train d’aller à la rencontre de responsables politiques espagnols et français notamment. «Le documentaire montre également sous forme de reportage les vaines tentatives de Bardem pour remettre au président Zapatero la liste des 230 000 signatures rassemblées sur le site todosconelsahara.com», souligne le site cineuropa.org.
A la sortie de certains entretiens, on le voit faire le débriefing avec le réalisateur dans une voiture, pour pouvoir consigner des propos tenus en off.
L'affiche du documentaire
Javier Bardem et l’équipe du film se sont confrontés à l’omerta qui règne sur le sujet.
Interrogé par France 24, le 6 juin dernier, il regrettait notamment l’échec des multiples demandes d’interview adressées au pouvoir marocain.
«Nous avons été dans l’impossibilité de rencontrer un représentant du gouvernement marocain, expliquait-il alors. Le gouvernement a refusé toute interview. C’est pourtant important que les spectateurs entendent ce qu’ils ont à dire, ce n’est pas un film avec un seul point de vue».
C’est ce que l’acteur explique dans la note du dossier de presse du film :
«Avec ce documentaire, nous avons essayé de mettre sous les projecteurs la situation d’un peuple et d’un conflit qui sont généralement poussés à l’arrière-plan des agendas politiques et diplomatiques de tous les pays concernés. Notre souhait est que, pendant le film, les spectateurs fassent un voyage, à la fois intellectuellement et émotionnellement, afin de parvenir à leurs propres conclusions. Le peuple sahraoui mérite cela et bien plus.»
«C’est un film touchant je trouve, qui pose une nouvelle fois la question de savoir comment l’on peut réaliser un travail équilibré lorsqu’une partie refuse de s’exprimer», souligne Aline Pailler, qui a rencontré elle-même cette difficulté lors de la préparation d’un documentaire diffusé sur France Culture sur le Sahara occidental.
Le Maroc ne s’y exprimant pas, l’argument facile du «documentaire militant» peut être rétorqué et donc justifier le refus de diffusion.
Pas de diffusion en cinéma
Le film soutenu par Javier Bardem semble également rencontrer des difficultés pour être diffusé dans les salles de cinéma en France. Ce qui serait, si cela se confirmait, encore plus surprenant.
Les contacts pris auprès du distributeur espagnol, Morena Films, auprès de la société française chargée de le vendre à l’international, Wild Bunch, et auprès d’un autre distributeur français, Haut et Court, qui aurait été en charge de la distribution, ne permettent pas d’y voir très clair.
Selon les premiers, Wild Bunch serait bien distributeur du film en France. Mais, jointe par téléphone le 6 juillet, Wild Bunch disait ne pas être chargée de sa distribution en France mais seulement de sa vente. Selon la personne jointe, «le documentaire de Javier Bardem est à notre catalogue et était même dans le catalogue présenté lors du marché du film organisé pendant le festival de Cannes». «C’est un film de niche, il peut finir par trouver un distributeur», ajoutait-elle.
A suivre !
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