A Mesdames et Messieurs les représentantes et les représentants des instances de presse et des moyens de communication et les organisations des droits humains amies.
A l’occasion de la Journée mondiale des droits de l’Homme nous présentons notre évaluation quant à la situation des droits humains dans notre pays durant la période s’étendant depuis le 10 décembre 2008 à ce jour.
Nous, l’Association Marocaine des Droits Humains, de par notre suivi de la situation des droits humains et notre travail de terrain quotidien tant au niveau central qu’à celui des quatre-vingt-dix sections de l’Association, sommes fort inquiets sur l’orientation générale que la situation des droits humains dans notre pays a prise durant les dernières années caractérisée par l’achoppement et même l’arrêt d’un bon nombre de projets et de plans inhérents aux droits humains et la régression qui a pris un rythme significativement plus rapide cette année tant au niveau des libertés et droits politiques en général qu’au niveau des droits économiques, sociaux et culturels. Cette situation s’illustre dans ce qui suit :
1. La persistance dans l’adoption d’une Constitution non démocratique et la violation du droit du peuple marocain à s’autodéterminer. Cette année a été caractérisée par l’organisation des élections communales le 12 juin 2009 et d’une série d’autres élections couronnées par le renouvellement du tiers des membres de la Chambre des conseillers. Une nouvelle occasion a été alors ratée et qui aurait permis de progresser vers la démocratie et le respect de la volonté des citoyennes et des citoyens à cause des conditions dans lesquelles se sont déroulées ces élections.
2. Quatre années se sont écoulées depuis la déclaration officielle des résultats de l’Instance Equité et Réconciliation et l’Etat n’a plus à atermoyer l’exécution des recommandations de l’Instance, il s’en est dérobé.
3. Trois années sont passées depuis la déclaration officielle de la plateforme citoyenne pour la promotion de la culture des droits humains sans l’application de son contenu. A notre point de vue, elle a été marginalisée en confiant la tâche de sa mise en application au Centre de formation, d’information et de documentation du Conseil Consultatif des Droits Humains.
4. La persévération des violations graves des droits humains dont le crime de l’enlèvement, l’arrestation arbitraire, la torture, les procès inéquitables.
5. L’atteinte au droit à la vie du fait de la violence perpétrée par les agents d’autorité et au sein des prisons, le bafouillage du droit aux soins, le manque de sécurité et la violence exercée à l’encontre des femmes et des enfants.
6. La torture et surtout dans les centres de détention illégaux (le maudit Centre de Témara).
7. Le harcèlement et les menaces à l’encontre des défenseurs des droits humains. Parmi les dossiers les plus importants dans ce contexte :
* L’arrestation arbitraire et la condamnation dure et injuste à trois années de prison ferme à l’encontre Chakib El Khyari le Président de l’Association Rif pour les Droits Humains.
* La condamnation du Président de la section de l’Association Marocaine des Droits Humains de Khénifra à trois mois de prison avec sursis et de 500 mille dirhams solidairement avec le Directeur de l’hebdomadaire Almichaâl emprisonné actuellement dans une autre affaire reliée à la liberté de la presse.
* L’arrestation du Président de la section de l’AMDH de Béni Mellal et de deux membres de la section et leur condamnation à un mois de prison ferme avec sursis.
* L’arrestation du Président de la section de l’AMDH de Tan Tan dans le cadre d’une affaire syndicale jugée en 2002.
* L’arrestation d’un membre de l’AMDH dans le cadre de protestations estudiantines à Taghjijt.
* L’arrestation de membres des sections de l’AMDH, en l’occurrence deux membres à Tan Tan, un membre à Assa, trois membres à Laâyoun et le Président de la section de Smara dans la cadre des arrestations des activistes sahraouis.
* L’arrestation d’activistes de l’Association Nationale des Diplômés chômeurs et des cadres diplômés supérieurs en chômage.
- L’exil forcé de par le cas de la citoyenne Aminatou Haïdar qui a été expatriée sans sentence judiciaire la condamnant.
8. La persistance de la détention pour des raisons politiques ou d’opinion, en l’occurrence le procès des étudiants de Marrakech, de Meknès, de Fès, des six détenus politiques engagés inconsidérément dans l’affaire Belliraj, un bon nombre de détenus de ladite Salafiyya Jihadiyya, les détenus sahraouis, les détenus dans le cadre des protestations sociales et le journaliste Driss Chahtane.
9. L’offensive lancée contre la liberté d’expression et de la presse eu égard aux affaires de Telquel, Nichan, le Journal hebdo, Economie / Entreprises, alahdath, almassae, aljarida aloula, almassae dans une autre affaire, akhbar alyaoum et almichâl dans deux affaires chacune et alayyam.
10. La violation du droit à la manifestation pacifique (les diplômes chômeurs et les cadres supérieurs, les ouvriers et les syndicalistes, les mouvements de protestation : les coordinations, Khnichat, Taghjijt …)
11. La violation du droit à l’organisation : un bon nombre d’organisations dont quelques sections de l’AMDH se sont vues refuser le récépissé de dépôt de dossier.
12. La violation des libertés individuelles eu égard l’affaire du Mouvement Alternatif pour les Libertés Individuelles (MALI).
* La justice : une justice qui est toujours dépendante, incompétente, non intègre. Ceci est évident eu égard et à la violation du droit à un procès équitable dans toutes les affaires politiques citées ci-dessus et à la violation du droit d’être traduit devant une autorité judiciaire et de l’égalité devant la loi en tenant compte des dossiers de la dépravation et les affaires dans lesquelles sont impliqués les personnalités influentes, et notamment les affaires de Leïla Benseddik, Hassan Yacoubi, Hafsa Amahzoune et un bon nombre de membres de sa famille.
* Le non-respect du contenu du Code de la famille et les concessions faites dans les affaires de la violence à l’égard des femmes, le viol et l’exploitation sexuelle des enfants.
* L’impunité est toujours de mise au lieu d’appliquer la recommandation de l’Instance Equité et Réconciliation relative à l’établissement d’une stratégie nationale contre l’impunité.
* L’exacerbation de la corruption et la propagation des différentes sortes de la dépravation économique.
13. La situation dans les prisons : la situation est de plus en plus catastrophique dans les prisons quant au niveau déplorable de l’alimentation, au surnombre des prisonniers, à la violation du droit au soin, à la violence et à l’oppression exercée par les gardiens qui ont causé des décès et l’interdiction des livres, des magazines, de la formation et la poursuite des études et le refus du Délégué général de l’Administration pénitentiaire et de la réinsertion le contrôle des organisations des droits humains et la dernière attaque à l’encontre de l’Association représentée par sa Présidente et son Vice-président.
Plusieurs prisons connaissent des grèves de la faim. Les prisonniers dits « Salafia Jihadia » ont entamé une grève de la faim depuis 16 jours.
14. La violation des droits économiques, sociaux et culturels et notamment :
* Le recul observé de l’indice de développement humain pendant quatre années successives depuis le lancement de l’initiative nationale pour le développement humain et qui a fait passer la Maroc du 123e rang en 2005 au 127e cette année. Il s’est avéré, de même, selon une étude de la Primature, que 87% des projets réalisés dans le cadre de cette initiative ne sont pas rentables.
* L’atteinte au droit à une vie décente à cause de la cherté de la vie, de la dégradation des services sociaux, du chômage et la détérioration des salaires.
* La violation du droit au travail, des droits des ouvriers, des droits syndicaux et la négligence du statut du travail en dépit de ses défaillances.
* La violation du droit aux soins (de nouveaux décès devant les hôpitaux, le taux de mortalité parmi les femmes à cause des accouchements …)
* La dégradation de la situation de l’enseignement public et la persistance de contenus contraires aux droits humains dans les programmes scolaires.
* Un grand nombre de familles ne peuvent pas disposer d’un habitat salubre et un bon nombre d’entre eux sont toujours guidés hors de leurs habitats sans alternatives convenables. De même, les sinistrés des inondations continuent à vivre dans des conditions inhumaines.
15. Les droits des femmes :
* Cette année a connu un très grand nombre des cas de violence à l’égard des femmes alors que le projet de loi pour la protection des femmes de la violence n’a toujours pas vu le jour comme c’est le cas pour la loi sur le travail dans les ménages qui préoccupent un grand nombre de femmes.
* En dépit de la déclaration officielle du 10 décembre 2008, les réserves sur la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ne sont toujours pas levées.
* Le Code de la famille connaît toujours ses mêmes défaillances inhérentes depuis son émission tant en ce qui concerne son incompatibilité avec les engagements du Maroc dans le domaine des droits de la femme qu’au niveau de la faible application de ce qu’elle contient comme contenus positifs.
* La persistance de la discrimination dans de nombreux domaines dont la scolarisation, le travail et les salaires.
16. Les droits de l’enfant : Les cas de violence à l’égard des enfants avec en tête le viol connaissent une croissance dramatique. De même, la pauvreté et la déperdition scolaire sont des facteurs qui poussent les enfants au travail dans des conditions inhumaines sans même avoir atteint l’âge légal. Ainsi, le cas de Zineb Chatit a dévoilé une situation qui ressemble éminemment à l’esclavage où vivent les filles travaillant dans les ménages.
17. Les droits des immigrés : Les immigrés et les réfugiés au Maroc ont été arrêtés et jugés en raison de leur protestation contre le non-respect de leurs droits de la part du Haut Commissariat aux Réfugiés et des autorités marocaines. En outre, les réfugiés subsahariens en général vivent des situations très dures du fait qu’ils sont privés de leur droit aux soins et que leurs enfants ne jouissent pas de leur droit à la scolarisation. De même, ils sont toujours menacés d’être conduits abusivement aux frontières et souffrent du racisme qui prend de l’ampleur.
18. Les droits des personnes à besoins spécifiques : Cette catégorie de citoyennes et de citoyens est considérée parmi les catégories les plus marginalisées par les politiques gouvernementales. Toujours est-il que l’Association enregistre positivement le fait que le Maroc a signé la Convention Internationale relative aux droits des personnes handicapées et le protocole facultatif annexe et le Gouvernement se doit de rendre la législation locale compatible avec les contenus de ces deux documents et de les mettre en application
NDLR Solidmar :
* arrestations et détentions de Ahmed Alansari, Brahim Dahane, Yahdih Ettarouzi, Saleh Labihi, Dakja Lashgar, Rachid Sghir et Ali Salem Tamek, défenseurs Sahraouis des droits de l'Homme, le 8 /10/2009.
* arrestations et détentions des Sahraouis Baba Ali Touni et Abdullah Dihan, Ismaili El-bachir, Youssel Lbraik, Salka Dahane, Enaama Asfari, Sultana Khaya, Mohamed Daddach, Ahmed Soubai, El Arbi Messaoud, Brahim El Smaili, Aatiquo Barai, Soukaina Jid Ahlou El Idriss, Izana Amidan, Mohamed Berkan, Hamza Edkheil et Abdellah Jdai, Chamad Marzouk, Salha Boutngaiza, El-Gasmi Lahbib,Med Tahlil, Chaikh Amidan, LafJah Faddah, Saaidi Salek, Aali Sadouni, Mohamed Tahlil...
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